30/03/2019

Théorie & Gilets Jaunes : Un échange




Voici un extrait d'un échange trouvé sur le site Des Nouvelles Du Front, une des bases arrières de la Communisation. C'est daté de janvier 2019 et ce sont des réponses à un article diffusé sur Paris Luttes Info intitulé Crise qui vient, souffle et gilets jaunes : où va-t-on ? On a ici d'un coté un tenant de la théorie, à la dure, réclamant un peu d'orthodoxie quand même, que diable?! chiant un peu sur les insurrectionnalistes au passage. Et de l'autre, quelqu'un d'un peu plus ouvert sur le fait que les Gilets Jaunes n'ont pas encore révélé tous leurs visages ou tous leurs potentiels. 

C'est toujours bien de se souvenir que certains pensent et échangent à des très bon niveaux de théorie. Je les considère comme des amis. Mais c'est finalement toujours dans une sorte de construction par opposition à eux que ma position, au sortir ce ces petites incursion chez les théoriciens, sort un peu plus clairement définie, comme en miroir. Je suis avec eux mais je ne suis pas des leurs. Je crois que c'est parce qu'ils sont matérialistes et pas moi. 

(Source)

#1 

Il y a une petite musique de fond qui est en train d’envahir la réflexion théorique ou politique autour de ce mouvement des gilets jaunes et ce texte l’illustre bien, à la suite de Robin, mais on peut l’entendre a plein d’occasions dans « lundi matin » et dans toutes les productions qu’on pourraient appeler « jaunistes » : la pensée marxienne, les références aux producteurs de marchandises, à la classe ouvrière, les gens qui ne se précipiteraient pas dans la rue en ce moment seraient devenue une espèce d’arrière-garde ronchonne, dépassée par les événements, qui ressasse son catéchisme communiste, les anciens quoi, ceux qui pensaient que la révolution à venir ne pourrait se passer du monde de la production… Des tontons maussades, has been, sidérés, assis sur leurs grimoires, devant la montée de ce qui serait devenu une irruption inattendue, spontanée, joyeuse, inventive d’un nouveau sujet ou plutôt, d’une nouvelle socialité révolutionnaire.
Je crois qu’il ne faut pas inverser la charge de la preuve. C’est comme pour l’existence de Dieu : ça n’est pas à ceux qui savent que Dieu n’existe pas de faire la preuve de sa non existence.
C’est aux jaunistes de nous expliquer comment, du plaisir de la socialité dans la lutte, du bonheur énorme de la solidarité contre l’Etat, contre les flics on passe à des acquis qui vont permettre d’abolir la propriété privée, à l’emparement, à la communisation…. C’est un peu facile d’envoyer paitre les pisse vinaigres de « l’ancienne théorie » quand on voit à quel point ce mouvement est en fait la somme complètement disparate de (presque) toutes les colères qui trainent dans ce pays. Et des colères, il y en a, et pas toutes très modernes…..
La décantation se fait doucement, envahie de pleins de bonnes volonté activistes qui essayent de souffler sur les braises de la grève générale dont il n’a encore jamais été question, tout ce beau monde s’excitant du Riot Porn que nous offre Paris chaque samedi et qui fait l’affaire de TOUT LE MONDE…. On verra bien….
Bref, continuons à jouir du spectacle, mais en gardant la tête froide…..


#2

Salut

“C’est aux jaunistes de nous expliquer comment, du plaisir de la socialité dans la lutte, du bonheur énorme de la solidarité contre l’Etat, contre les flics on passe à des acquis qui vont permettre d’abolir la propriété privée, à l’emparement, à la communisation…”

Nous avons affaire tout simplement à un mouvement de classe, à la lutte de classe. Est-ce que nous avons demandé en 1995, en 2003, en 2005 (banlieues), 2006 (CPE), 2010 (Retraites), 2016 (loi travail), etc. comment ces mouvements allaient “abolir la propriété privée” “pratiquer l’emparement et ouvrir la voie à la communisation…” ? Il est important de critiquer ce type de discours hyperboliques (et je l’ai fait) qui pouvaient également exister dans les mouvements précédents. Mais, maintenant il faudrait enfin (perso je suis resté longtemps dans l’expectative), tout simplement, voir la lutte de classe dans ce qu’il se passe. La lutte de classe est quelque chose de très simple, c’est d’abord et avant tout une réaction et une lutte contre l’injustice et les inégalités sans présupposer la révolution et le communisme. Là, maintenant, le grand truc, dans ce mouvement, c’est que toute les inégalités sont connectées, sans revendications formellement explicitées et sans formes (pour l’instant) de négociations. C’est la lutte de classe bête, violente (je ne parle pas des boxeurs) et qui embarque avec elle toutes les tares de cette société, c’est normal, elles sont là et nous les partageons, les prolétaires ne passent pas par des formations de politiquement correct avant de lutter. De ce point de vue l’absence de discours anti-assistés (sauf très marginalement) est remarquable, ainsi que le flop de la volonté de Macron d’introduire dans le “Grand Débat” les questions de l’immigration et de l’identité.
Depuis novembre, à l’intérieur de l’interclassisme, l’hégémonie a changé dans le mouvement. Bien sûr il n’y a pas “toute la classe”, il y a même de grands absents. Il y a même des “contradictions au sein du peuple”. Et alors ? On ne peut pas parler de la restructuration, de la fin de l’identité ouvrière, de lutter en tant que classe comme la limite de la lutte de classe (c’est aussi l’interclassisme) et attendre les grands bataillons de Billancourt. Doit-on vraiment alors s’étonner de ne pas retrouver les formes de mobilisation et d’actions en vigueur depuis le début du XXè s. En gros, ceux et celles qui sont là ce sont ceux et celles dont les types d’emplois, la déstructuration des lieux de travail rendent la mobilisation collective “traditionnelle” impossible. Sans oublier qu’il apparaît que cela crée une sorte d’appel d’air sensible dans la remontée des revendications salariales ici et là.
Ce mouvement interroge toutes les déterminations de la restructuration du mode de production capitaliste, il agit comme un analyseur global, social : deconnexion; mise en abimes des territoires, illégitimité de la revendication ; dénationalisation de l’Etat, effondrement du mouvement ouvrier organisé, identité ouvrière, représentation politique… les Gilets jaunes ne préfigurent aucune “solutions” aux questions de la communisation, ils préfigurent seulement les problèmes.
Il s’agit bien de rapports de distribution, de vie quotidienne, d’idéologie. Mais comment cela se passe, qu’est-ce que cela désigne ? Avec cet “interclassisme”, cette prédominance de la distribution et de l’injustice fiscale (il faut tout de même reconnaître là-dessus la lucidité du mouvement : violence contre violence, mépris et insultes contre mépris et insultes), la volonté d’existence politique, tout cela c’est de façon inattendue le fait de lutter en tant que classe comme limite de la lute de classe ; cette dialectique peut nous surprendre.
Je ne peux pas refréner une petite joie en apprenant que Dior avance au vendredi son défilé prévu samedi.
Où ça va ? Est-ce que nous devons reconnaître comme lutte de classe que ce qui incarne le sens prédéterminé de l’Histoire ?
Ces considérations ne rendent pas caduques mes interventions précédentes, ni le texte de TC de novembre (si ce n’est – ce qui n’est pas rien – sur la question de l’hégémonie à l’intérieur du mouvement) elles les ORIENTENT.

R.S

29/03/2019

Affichettes de stock

Les évènements sont une source intarissable d'inspiration pour la production de matériaux visuels de propagande. En voici donc encore quelques-uns dirigés directement contre cette merde que certains appellent encore président, contre son gouvernent, son parti, et leur idéologie. Je les ai en "grand" format, A4 et A3. Prochain Acte que je fais sur Paris, j'en accrocherai bien certaines sur ces petites lignes suspendues qui bordent les manifestations.  








26/03/2019

Playlist #WEEK13/19 - 'MixTape'

Toujours pas de playlist thématique mais une nouvelle compilation de mes dernières trouvailles. J'annonce c'est un peu le bordel et encore, je me suis gardé une partie sous le coude pour une prochaine. On navigue donc du jazz (Coltrane), funky (Prince) ou moins (Bobby Wright), au rap, US barré (Earthgang) et anglais bien sage (Pinty), le tout avec des détours par de l'ambiant du genre obscure (Cloudead). En années on ratisse large également, des 70's à nos jours avec un arrêt par l'underground électronique des années 90. 

Bonne écoute! 

1. Prince - 17 Days (Piano & microphone 1983 version)
2. Alice Coltrane - Turiya And Ramakrishna
3. Earthganag - Road to Mirrorland : So Many Feelings
4. Knowledge - Intherain_
5. Bobby Wright - Blood Of An American
6. Sun Araw - Horse Steppin'
7. Pinty - Nightcrawler
8. King Krule - Neptune Estate
9. Emily King - Remind Me
10. Oklou - A Hard Working And Loyal Bitch 
11. Odd Nosdam - cLOUDDEAD (Instrumentals)
12. Unkle - Rabbit In Your Headlight (Instrumental)


 

25/03/2019

Réalité alternative en Macronie


La macronie c'est moins le refus de la réalité qu'une tentative acharnée de créer/maintenir une réalité alternative. C'est ça aussi l'extrême centre.

Et c'est valable pour une part immense du discours médiatique, mais l'Acte XVIII semble avoir poussé le pouvoir à franchir un palier. Il y avait un black bloc sur les Champs Elysée, nombreux et organisé, et face auquel la stratégie de la police n'était tout simplement pas judicieuse. On ne nasse pas plus de cent mille personnes sur une avenue, en tentant de scinder la manif en deux tout en gazant tout attroupement autour des rues adjacentes alors qu'un groupe capable de tenir tête se trouve dans le cortège... Mais au lieu de le concéder, Castaner a tout simplement inventé un black bloc de 8500 manifestants venus pour tuer. Le ministère et toute la macronie en coeur nous expliquent dès lors que le préfet de Paris était une petite frappe désorganisée, et qu'à leurs yeux, la répression qui ce jour-là encore fabriquait des estropiés, n'était simplement pas assez rude. Une répression que nous sommes d'ailleurs priés de nommer autrement.

Et c'est comme ça tous les jours. Les mecs sont en roue libre sur la fabrication d'un monde parallèle et ont bien entendu récidivé pour justifier les blessures de Geneviève Legay à Nice lors de l'Acte XIX. Le Monde.fr : « Gilets jaunes » : « aucun contact » entre la manifestante blessée à Nice et un policier, selon le procureur

Je note simplement le détail des 'faits alternatifs' vomis par le procureur et repris dans l'article :
"Il y avait derrière elle trois personnes, « un journaliste qui filmait, une autre manifestante et une autre personne à la casquette marron ». « On ne voit pas qui la pousse », mais « elle n’a pas été touchée par les forces de sécurité »."
Elle est pas belle la version alternative pondue grace à la magie du pipeau du pouvoir et forcément amplifiée par des médias qui préfèrent aussi cette réalité alternative qui simplifie quand même bien les choses puisqu'elle exonère les institutions et la police. Et puis ce sont ces mots qui par magie permettent à Macron d'affirmer :



On voit bien là toute la misère des faits quand certains refusent catégoriquement de 'voir' ce qui crève pourtant les yeux. Tout être humains s'arrête naturellement sur les blessures de madame Legay et sur la charge policière qui l'a conduite à hurter le pilier. Mais la macronie voit autre chose. Elle voit trois personnes entre les boucliers et les matraques et se demande qui a "poussé" Geneviève.

La petite histoire aurait eu plus de gueule avec un semblant d'humanité et il aurait pour ça suffit que le procureur imagine qu'une de ces trois personnes l'ai "entrainée dans sa chute". Mais pourquoi arrondir les angles quand on a toute la légitimité d'un fait derrière soit ? Il y avait des personnes derrière la dame au drapeau, c'est un fait.

Et non, les faits capturés par la photo ci-dessus, à savoir un flic en armure enjambant le corps d'une vieille dame blessée presque inconsciente et marchant sur le drapeau paix qu'elle tenait quelques seconde plus tôt, ces faits n'apportent rien à l'appréciation de la réalité puisque celle-ci se borne à se qui s'est produit entre madame Legay et les boucliers. Une réalité acceptée et racontée par les médias de masse. La fabrication d'une réalité alternative, c'est donc aussi le maintient acharnée d'effet de loupe par l'entremise d'un porte voix.

On nage en fait en plein délire devant le refus de poser la seule question valable : Une mobilisation pacifique, les FDO sont en sur nombre, une vieille dame se tient à 3 mètres et on donne l'ordre de charger. Vous faites quoi? Mais ils ne mentent pas alors tout va bien, même s'ils ont menti la veille.

Au final, tout cela révèle que cette réalité n'arrange pas que le pouvoir politique mais absolument tous les défenseurs du statu quo, tous ceux qui veulent que rien ne change. Ces malades se sont mis en tête de fabriquer une réalité de substitution qui, ne l'oublions pas, permet à d'autres, ou aux mêmes, de gagner du temps pour pouvoir se gaver avant de terminer de faire sécession.

Si le gout de vomi dans votre bouche n'est pas encore assez prononcé, vous pouvez vous faire une idée de la pénétration de ces méthodes et de cette réalité dans la base électorale de l'extrême centre en lisant quelques commentaires sur leMonde.fr. Exemples :




PS : Je vous invite a regarder quelques docus d'Adam Curtis sur le sujet. The Power of Nightmare notamment, raconte la manière dont les néoconservateurs et la justice américaine ont modelé la réalité autour d'Al Qaida. Le but était de faire rentrer ce qui n'était pas réellement une organisation, dans des cases juridiques devant permettre des procédures d'ordinaire réservées au crime organisé. Comprenez bien la différence entre manipuler des terroristes et manipuler l'image / la compréhension qu'on en a. (Tout ça en janvier 2001, donc rien à voir avec 9/11 et tout à voir avec les précédents attentats revendiqués par Ben Laden.) Regardez aussi Hypernormalisation.

24/03/2019

What would jesus do?


WWJD. Vous ne serez pas étonné d'apprendre que dans les années 90 aux Etats-Unis, on vendait des bracelets avec ces initiales et qu'ils étaient très populaires parmi les chrétiens évangélistes. C'est devenu une sorte de référence culturelle puis forcément un même à l'heure d'internet. Et avec la radicalisation des fondamentalistes chrétiens et du parti républicain qui leur sert depuis longtemps de base arrière, cette phrase a fini par prendre un sens différent et est plutôt utilisée aujourd'hui pour se moquer du décalage immense qui existe entre la doctrine définie par l'histoire de Jesus et les principes défendus par cette droite dont chacun s'accorde à dire qu'elle est complètement barrée.

Voilà ma version en gilets jaunes adressée à Macron, autoproclamé défenseur de la relation entre le catholicisme et la France...

#JesusRenverseLaTable

#JesusDéfonceraitLesChamps







 
CAMARADES